Que devient la bonne nouvelle de la vie après la mort ?

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Beaucoup n’ont pas foi en la Résurrection, y compris des personnes que les statistiques comptent parmi les chrétiens. Le témoignage du Nouveau Testament est divers, et cela se comprend sur un sujet qui échappe nécessairement aux conceptions que l’on peut en avoir.

Beaucoup n’ont pas foi en la Résurrection, y compris des personnes que les statistiques comptent parmi les chrétiens. Il est vrai qu’un message aussi inouï n’est pas spontanément compris. Il a été trop, et souvent mal, exploité. Il a pu servir, par exemple, de consolation à bon compte pour les malheureux de ce monde, auxquels les puissants annonçaient, de façon perverse, que le ciel compenserait plus tard les injustices dont ils avaient été victimes. Il a aussi été contrebalancé par une prédication alarmante brandissant les peines de l’enfer. Que devient la bonne nouvelle de la vie après la mort si l’on a une chance sur deux de se retrouver, dans l’au-delà, du mauvais côté de la barrière ?

Extrait d’une émission de RCF où Michel Quesnel parle de Jésus et de Jérusalem

De superbes représentations du Jugement dernier

Certes, les superbes représentations du Jugement dernier sculptées aux tympans des cathédrales ont un solide appui dans l’Évangile. Elles visualisent la page célèbre dans laquelle toutes les nations comparaissent devant le Fils de l’homme pour que chacun reçoive le salaire de sa conduite :
« J’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire […]. Alors il dira à ceux qui seront à sa droite […]. Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche […] »
(Mt 25,31-46).
Mais l’image, pour belle qu’elle soit, peut trahir quelque chose de la subtilité de la parole. La division de l’espace en deux - à droite de Jésus pour les élus, à gauche pour les damnés — présente le ciel et l’enfer comme deux lieux équivalents, aussi probables l’un que l’autre, et, ce qui est plus grave encore, faisant l’un et l’autre partie du projet de Dieu sur les humains. Est-ce là le contenu de la Bonne Nouvelle ?

Or, à y regarder de près, Matthieu fait dire à Jésus à propos du paradis :
« Venez, les bénis de mon Père, recevez en partage le Royaume qui a été préparé pour vous depuis la fondation du monde » (Mt 25,34).
À propos de l’enfer, au contraire :
« Allez-vous-en loin de moi, maudits, au feu éternel qui a été préparé pour le diable et pour ses anges » (Mt 25,41).

Effectivement, l’image du feu correspond à une situation de détresse éternelle dont personne ne peut dire qu’il est automatiquement préservé ; si Dieu crée l’homme libre, il se doit de respecter sa liberté au point de ne pas l’obliger au bien et de ne pas davantage s’imposer à lui pour l’éternité. Cependant, dans son langage imagé, le texte affirme clairement pour qui le feu a été allumé : le diable et ses anges. S’il reste possible pour l’homme de le choisir, il n’est pas dans l’intention de Dieu qu’un humain s’y consume. Ce n’est qu’à regret, pourrait-on dire de façon anthropomorphique, que Dieu se résoudrait à y voir souffrir l’un des siens.

« Nous ne pouvons certes qu’esquisser une image de l’au-delà. Mais je n’ai aucun doute sur son existence. Je crois que nous sommes un esprit divin dans un corps physique, et que notre enveloppe s’éteint, disparaît, le passage franchi. Je vois la vie comme un terrain d’expériences, d’apprentissages précieux permettant à chacun de se découvrir en vérité et en plénitude. Pour, au final, retourner à un état de perfection, semblable à celui du nourrisson, qui n’a rien d’autre à donner et à recevoir que de l’amour. »
(Texte de Marie-Elise LARENE dans LA VIE Les Essentiels du 5 novembre 2015.)

Ne pas tenir compte du seul texte de saint Matthieu

Par ailleurs, il faut se garder de construire des représentations de la fin ultime du monde à partir du seul texte de saint Matthieu. Le témoignage du Nouveau Testament est divers, et cela se comprend sur un sujet qui échappe nécessairement aux conceptions que l’on peut en avoir. Dans le chapitre de la première Epître aux Corinthiens qu’il consacre à la Résurrection, saint Paul présente au contraire l’état ultime du monde créé comme entièrement soumis à la puissance du Christ, le démon et toutes les puissances du mal ayant été définitivement vaincus :
« Ensuite viendra la fin, quand le Christ remettra la royauté à Dieu le Père, après avoir détruit toute Domination, toute Autorité et toute Puissance. Car il faut qu’il règne, jusqu’à ce qu’il ait mis tous ses ennemis sous ses pieds. Le dernier ennemi qui sera détruit, c’est la mort, car il a tout mis sous ses pieds »
(1 Co 15,24-26).
Pas un mot de l’enfer dans ce passage, et même rien qui oriente la compréhension vers la possibilité d’une situation éternellement tragique pour une partie de l’humanité : le pouvoir du Christ, qui se mettra en place à la fin des temps, sera universel. Cela ne veut pas dire que Paul évacue constamment le Jugement dernier et la possibilité d’un enfer, mais la victoire finale du Christ au terme de l’Histoire en réduit considérablement l’âpreté.

La réincarnation plus attirante que la résurrection

Les écrits de saint Paul sont cependant beaucoup moins lus que les Evangiles, y compris et surtout par les chrétiens. Son optimisme sur l’avenir de la création n’a pas réussi à s’imposer. Cela a conduit nombre de nos contemporains à être déçus par les représentations de l’au-delà répandues par le discours des Eglises, et à estimer la réincarnation ou la métempsychose plus attirante que la résurrection.

Michel Quesnel : « Jésus, l’homme et le Fils de Dieu », Flammarion, 2004

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