Certes, un certain nombre de catholiques ont du mal à accepter le tournant de Vatican II. On voit mal, pourtant, comment l’Eglise romaine pourrait parvenir à en annuler les grandes ouvertures. On sent bien que de hauts dignitaires et des bureaux de la Curie s’efforcent de revenir en deçà du Concile et on a parfois l’impression que Jean-Paul II penche de leur côté.
Mais la réhabilitation de Galilée, les demandes de pardon répétées du pape pour les péchés de l’Eglise catholique, les voyages pontificaux dans les pays orthodoxes et protestants, l’ouverture en direction de l’islam, du judaïsme et des autres grandes religions du monde vont bien dans le sens de Vatican II. Un retour à la case départ est difficilement concevable, même si le chemin à parcourir est encore long.
l’Eglise catholique est capable de retournements surprenants
Il est en tout cas évident pour l’observateur impartial que l’Eglise catholique est capable - heureusement ! - de retournements surprenants, retournements qui ne sont pas aisés à mettre en œuvre mais qui constituent une preuve supplémentaire de ses capacités d’adaptation aux conditions changeantes du monde.
L’exemple le plus probant en est son attitude sur la question des « droits de l’homme ». Pie VI les avait condamnés au début de la Révolution française. Les voici maintenant au centre des revendications de Jean-Paul II. Raison pour laquelle un prochain pape devra choisir nettement entre Pie IX (le repli sur le passé) et Jean XXIII (l’ouverture au monde contemporain). Si Jean-Paul II a donné des gages des deux côtés, l’indétermination ne sera bientôt plus tenable. L’avenir des chrétiens dépend
« de la capacité qu’ils auront à faire preuve de créativité » :
je partage entièrement cette conviction de Jean Joncheray, vice-recteur de l’Institut catholique de Paris. Il nous faut plus que jamais continuer à inventer le christianisme.
Jean Delumeau : Guetter l’aurore, p. 263