Quand j’étais étudiant, hormis sur le plan politique avec la guerre froide, l’avenir de l’espèce humaine était envisagé avec optimisme. Les réacteurs nucléaires promettaient de l’énergie à bas prix et la fin de la pauvreté dans le monde… Les progrès de la chimie dans le domaine des fertilisants laissaient entrevoir un accroissement considérable du rendement des terres cultivées. La « révolution verte » empêcherait la famine… Les développements et les applications de la médecine, en particulier en matière d’antibiotiques, allaient permettre de guérir un grand nombre de maladies mortelles et d’écarter tout risque de pandémie… Les scientifiques œuvrant dans ces secteurs vivaient dans l’euphorisante conviction de préparer activement l’avènement du bonheur pour l’humanité.
Pourtant, au cours des années 1970, 1980 et surtout 1990, des nuages sombres ont progressivement assombri ce ciel idyllique.
Ce fut d’abord la suspicion d’un réchauffement climatique planétaire (effet de serre) engendré par le rejet de gaz carbonique dans l’atmosphère, du fait de la combustion du pétrole, du gaz naturel et du charbon. Elle fut étayée par les premiers calculs effectués à l’aide de modélisations mathématiques. Les Nations unies confièrent alors à un groupe constitué de plus de 2 500 spécialistes parmi les meilleurs à l’échelle internationale (le GIEC) la mission d’étudier cette question. Le réchauffement fut confirmé et l’industrie humaine identifiée comme en étant la cause principale.
Hubert Reeves : « Je n’aurai pas le temps » p 270