On pourrait imaginer que les guerres de religion qui ensanglantent la France de 1562 à 1598 provoquent, ici comme ailleurs, une sévère opposition au gouvernement de la part des calvinistes, au moins après les massacres de la Saint-Barthélemy en 1572, et de celle des ligueurs à partir de 1576.
La Bretagne est peu touchée par les troubles religieux
Mais la nouvelle province échappe à la règle générale : elle compte peu de protestants, qui ne rencontrent guère d’adeptes que dans quelques grandes familles nobles, tels les Rohan et les Laval, intéressés par les biens du clergé, et une fraction de la bourgeoisie. La Bretagne est si peu touchée par les troubles religieux que la fameuse Saint-Barthélemy n’y fait en tout et pour tout qu’une seule victime. Le plus grand nombre, la masse des paysans, demeure fidèle à la religion catholique, au respect de ses rites, à la croyance dans les œuvres, les sacrements, la présence réelle du corps du Christ dans l’hostie.
La Bretagne est une véritable pépinière d’ecclésiastiques
Comment en serait-il autrement ? À la veille des guerres de religion, le pays nantais compte un prêtre pour 100 habitants, un peu plus tard, au lendemain de celles-ci, 1 pour 200 à 300 habitants en Haute - Bretagne. Le pays est une véritable pépinière d’ecclésiastiques qui sont ici deux fois plus nombreux qu’ailleurs. C’est essentiellement le clergé qui établit la paix sociale et spirituelle, et qui évite donc aux gouvernants les désagréments de troubles politiques et militaires. L’absence de résistance à la France, à cette époque, fait d’autant plus notable qu’il est unique à ce point, repose essentiellement sur la foi encadrée par le clergé. Certes, la Bretagne traversera, de 1589 à 1598, une période de fortes turbulences, mais celles-ci seront plus liées à l’ambition d’un homme qu’à des affaires strictement religieuses.
Extrait de Philippe Tourault : « La résistance bretonne du XV° siècle à nos jours » Perrin, 2002