Le financement des religions.
Admettons sans hypocrisie qu’il y a une contradiction entre la volonté de reconnaître les religions comme un facteur positif dans la société et celle de les extraire des influences étrangères tout en leur interdisant toute forme de financement public et en prétendant les traiter à égalité.
Sur le plan des principes, cela est irréprochable et satisfait les laïcistes sourcilleux. Dans la réalité, chercher à accomplir en même temps ces quatre voeux se révèle contradictoire.
Quelles sont les difficultés auxquelles nous nous heurtons ? De mon point de vue, elles concernent toutes les religions et sont de deux types : toutes ont un problème de recrutement, de formation et de rémunération des ministres du culte, toutes ont également une difficulté de financement des lieux de culte.
Les ministres du culte ont un statut social imparfait et modeste, qu’ils soient imams, pasteurs, prêtres ou rabbins.
Prenons l’exemple des prêtres catholiques : leur situation sociale, c’est le moins que l’on puisse dire, n’est ni viable, ni enviable. La sécurité sociale pour les ministres du culte n’est acquise que depuis 1978 ! Les prêtres ne touchent une retraite indexée sur le SMIC que depuis 1997 ! La grande majorité d’entre eux reçoit moins que le SMIC comme salaire réel mensuel !
La loi de 1905 n’a pas tout résolu, n’a pas tout prévu, n’a pas tout réglé. Il y a bien un équilibre proposé par cette loi, qu’il convient de ne pas dérégler, mais aussi de légitimes possibilités d’ajouts pour répondre aux réalités du nouveau siècle.
En ce qui concerne la formation des ministres du culte, notre pays a intérêt à ce que celle-ci soit compatible avec l’esprit et la pratique de la République. En outre, l’implication de l’État pourrait permettre de rompre avec les influences étrangères. Vaut-il mieux des imams étrangers, formés à l’étranger et parlant une langue étrangère, ou des imams formés à l’université française et parlant français ? Poser la question est déjà y répondre financement public des lieux de culte.
En matière de financement public des lieux de culte, je suis convaincu qu’à partir du moment où la loi de 1905 et la conception française de la laÏcité reconnaissent la religion comme un élément important et structurant de la société ainsi que la liberté de croire comme une des grandes libertés, l’État doit poser la question de façon plus ambitieuse qu’aujourd’hui.
Ainsi, on trouve naturel que l’État finance un terrain de football, une bibliothèque, un théâtre, une crèche ; mais à partir du moment où les besoins sont cultuels, l’État ne devrait plus engager un centime !
Je n’ignore pas les problèmes qu’entraînerait une contribution directe de l’État. La question des critères se poserait nécessairement : qui a droit à l’aide de l’État ? qui n’y a pas droit ? Mais ce n’est pas parce qu’un problème est difficile qu’il faut l’occulter. A mon sens, il est temps de poser la question du financement national des grandes religions et celle de la formation « nationale républicaine » des ministres du culte. À cet effet, je suis partisan de compléments à la loi de 1905, sans en modifier pour autant la structure profonde.