Les jeux vidéos : l’exemple de « Manhunt »

Une histoire interactive dans laquelle le joueur ne joue plus, mais procède à une quantité incalculable de carnages. || En complément un article sur « World of Warcraft »

Prenons un exemple parmi les plus vendus à l’heure actuelle avec le jeu Manhunt, littéralement « Chasse à l’homme » :

Le personnage, un condamné à mort échappant de justesse à la chaise électrique, doit tuer, nous devrions dire massacrer, des centaines d’ennemis avec ses poings, mais aussi étouffer ses adversaires avec des poches plastiques, il peut également égorger avec des tessons de bouteilles…

Les dernières parties de jeux sont quant à elles réglées avec une tronçonneuse suivant un réalisme saisissant ! Certains critiques pourraient d’ailleurs objecter le peu d’originalité, voire la banalité du scénario très proche des intrigues de nombreux films violents ou d’horreurs actuels, à la différence près que Manhunt n’est pas un film, mais bel et bien une histoire interactive dans laquelle JE SUIS directement impliqué en tant que joueur.

Lorsque le « personnage » se déchaîne sur un adversaire, en réalité, C’EST MOI-MÊME qui me projette littéralement dans la violence de l’action par l’intermédiaire du logiciel de jeu et du Joystick directement adaptés des simulateurs de vol dont nous parlions précédemment.

Dans le cas présent il ne s’agit plus de simuler le survol d’un territoire ennemi mais il faut constamment jumeler ses propres pulsions de violence, de haine etc. avec la « chasse à l’homme », sachant que l’homme en question, C’EST MOI ! Autrement dit, le joueur ne joue plus, mais procède à une quantité incalculable de carnages.

Lorsque j’assène un coup-de-poing ou une autre percussion, simultanément, le joystick vibre dans mes propres mains, me donnant alors la sensation physique puis psychologique d’un véritable coup-de-poing asséné… mimétisme qui s’amplifie au fur et à mesure des parties jouées à travers des sentiments de peur ou de vengeance totalement exacerbés.

Ce jeu est interdit aux moins de 18 ans, mais ce barème est purement formel à travers les simples principes de reventes, de prêts ou de trocs pouvant toucher jusqu’aux 10-12 ans pour ne pas dire moins encore

Benoît Domergue : « Culture Jeune et ésotérisme » p. 37


La folie « World of Warcraft »

Ce jeu vidéo sur Internet rassemble huit millions de personnes à travers le monde.

Devant son ordinateur, votre ado lance son armée composée d’hommes à trognes patibulaires sur l‘ennemi. Ses ordres fusent, nets, concis. Deux heures plus tard, il quitte ses camarades et vient s’asseoir à table pour le dîner. Il sort de « World of Warcraft », ou « WoW ». Ce jeu vidéo ultra-populaire (8 millions de joueurs à travers le monde), lancé en 2005 en France est paru le mois dernier sous sa dernière version. Son éditeur, Vivendi games, en a vendu 2,4 millions de copies le premier jour, sur trois continents.

→ A ECOUTER : Extrait 1 de 1’48 : Maxime Coulon, auteur de « Le monde sans fin des jeux vidéo » était interrogé sur « Fréquence Protestante » le 30 avril 2010.

Les enfants ne jouent plus seuls mais par milliers en même temps

WoW appartient à la nouvelle génération de jeux vidéos sur Internet. Son principe : les enfants ne jouent plus seuls ou avec quelques amis devant l’écran, mais par milliers et en même temps. Ils parcourent un monde virtuel de plusieurs centaines de kilomètres carré, où l’on trouve donjons, jungles et landes désertiques à profusion. Chaque joueur y incarne un personnage – une orque, un elfe, un mage ou un voleur, homme ou femme, bon ou mauvais.
Avec quelques heures d’expérience, tous peuvent s’organiser entre amis ou avec des inconnus, pour mener des quêtes aventureuses ou de grandes batailles.

→ A ECOUTER : Extrait 2 de 1’18 : Maxime Coulon, auteur de « Le monde sans fin des jeux vidéo » interrogé sur « Fréquence Protestante » le 30 avril 2010.

Le jeu rassemble adultes, ados et plus petits, car il est extrêmement simple à manier : quelques minutes suffisent pour maîtriser son personnage. Par la suite, il suffira de jouer de jouer le plus longtemps possible pour augmenter sa force. Le jeu ne fonctionne pas selon un scénario préétabli, il ne connaît ni fin ni limite de temps. Et c’est bien le problème : les risques d’addiction sont très forts avec WoW, s’inquiète Michael Stora, psychologue.
Les joueurs s’immergent dans un monde virtuel et y développent une petite vie. Ils peuvent y passer un temps infini s’ils le souhaitent, notamment parce qu’ils n’y sont pas seuls. »

L’organisation en groupes peut être instructive : on apprend à respecter une certaine hiérarchie, à accomplir des objectifs communs, on échange matériel et conseils. Mais selon Michael Stora,
« le groupe a aussi ses exigences : les enfants n’osent pas abandonner leurs camarades en plein champ de bataille, parce que c’est l’heure du dîner. Il faut veiller à ce que le jeu ne déborde pas sur la vie réelle. »

→ A ECOUTER : Extrait 3 de 1’26 : Maxime Coulon, auteur de « Le monde sans fin des jeux vidéo » interrogé sur « Fréquence Protestante » le 30 avril 2010.

A notre avis

WoW n’est pas un jeu très esthétique : les personnages sont souvent repoussants, les couleurs criardes. Mais il n’est pas particulièrement violent : on part en aventures, on rêve dans des décors immenses.
Il faudra néanmoins réfléchir à deux questions avant de brancher l’ordinateur familial dessus : d’abord, son prix. Acheter le coffret (35 euros) ne suffit pas, il faut payer en plus un abonnement pour accéder au terrain (de 10 à 13 euros par mois). Cela peut revenir cher à la longue. Ensuite son côté addictif : l’éditeur du jeu le recommande à partir de 12 ans. De plus jeunes peuvent y jouer, mais il faudra veiller, encore plus qu’avec les ados, à ce qu’ils n’y consacrent pas tout leur temps.
Pour cela, un « compte parents » permet de régler à l’avance les heures auxquelles les enfants ont la possibilité de se connecter. Surtout il serait bon d’essayer de comprendre soi-même le jeu et ce qu’ils y font, au lieu de les laisser développer un monde parallèle dans leur chambre.

Louis Imbert (dans le journal La Croix du 21 février 2007)

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