Medjugorje : la décision de Rome se fait toujours attendre

Que penser des « apparitions » de Medjugorje ? Pourquoi l’Église ne s’est-elle pas encore prononcée ? ( Article paru dans le Journal La Croix du 14 février 2017)

Avant de rendre publiques les conclusions du rapport d’enquête sur les apparitions présumées dans ce sanctuaire marial de Bosnie-Herzégovine, le pape a nommé, samedi 11 février, un envoyé spécial pour évaluer la situation sur place.

Pourquoi le pape a-t-il nommé un envoyé spécial à Medjugorje ?

Alors que le Vatican n’a toujours pas statué sur l’authenticité des apparitions mariales à Medjugorje, le pape a dépêché sur place un envoyé spécial pour évaluer la situation pastorale, samedi 11 février, fête de Notre-Dame de Lourdes, date hautement symbolique dans la vie de l’Eglise. De fait, près d’un million de pèlerins se rendent chaque année dans ce sanctuaire marial de Bosnie-Herzégovine, où, selon les six voyants, la Vierge apparaîtrait encore tous les soirs. Un chiffre considérable au regard des autres sanctuaires mariaux « officiels » et que l’Eglise ne peut ignorer, quelle que soit sa décision.

Mgr Henryk Hoser, l’archevêque de Varsovie-Praga (Pologne), aura donc pour mission de réunir, d’ici à l’été prochain, des informations « plus approfondies sur la situation pastorale de cette réalité et, surtout, sur les exigences des fidèles qui s’y rendent en pèlerinage, afin de suggérer d’éventuelles initiatives pastorales pour l’avenir ». Sa mission ne concernera nullement en revanche le volet doctrinal, qui relève de la Congrégation pour la doctrine de la foi.

Pourquoi l’Église ne s’est-elle pas encore prononcée ?

Elle s’est déjà prononcée à vrai dire, avec la déclaration des évêques de l’ex-Yougoslavie en 1991. « Sur la base des recherches effectuées, affirmait-elle, il n’est pas possible d’établir qu’il y a eu des apparitions ou des révélations surnaturelles. » L’Église en est restée à cette position et, si les démarches privées ne peuvent être interdites, les pèlerinages officiels sont en revanche prohibés.

Vraies ou fausses apparitions, comment s’y reconnaître ?

Pour aller plus loin, Benoît XVI a mis en place en 2010 une commission d’enquête. Pilotée par le cardinal italien Camillo Ruini, elle a remis son rapport au pape François en janvier 2014.

Mais depuis, le pape François n’a fait aucune annonce. Interrogé par la RAI samedi sur ce silence, le cardinal Ruini a évoqué deux raisons. D’une part, « le phénomène est présenté comme toujours en cours, du moins pour ce que l’on nous en dit ». D’autre part, ce dossier est « très complexe » : « Qui l’a analysé dans les détails le sait… », a-t-il ajouté, énigmatique.

Même si, depuis 1981, de nombreux pèlerins témoignent de conversions, de guérisons ou de la naissance d’une vocation, le phénomène Medjugorje présente plusieurs zones d’ombre :

  • intérêts financiers engendrés par le tourisme (1),
  • désobéissance et comportements déviants de certains franciscains qui ont accompagné les voyants (Tomislav Vlasic, leur directeur spirituel renvoyé de l’état clérical en 2009)…

Medjugorje s’inscrit aussi dans le contexte plus large du bras de fer qui oppose depuis un siècle la province franciscaine d’Herzégovine et les évêques locaux.

Que pourrait faire le pape ?

La nomination de Mgr Hoser pourrait aller dans le sens de l’une des hypothèsesévoquées en juillet dernier au Vatican : la possible création d’une prélature territoriale avec un administrateur apostolique. Medjugorje serait alors géré directement par Rome

À plusieurs reprises, le pape François a pris ses distances à l’égard de l’idée d’une Vierge Marie « chef de bureau de poste, qui envoie chaque jour une lettre différente ». « Il ne retient pas comme approprié le mode dont les apparitions sont présentées, avec un horaire déterminé et tous ces détails qui semblent donner l’impression que la Vierge agit sur commande », a confirmé samedi le cardinal Ruini à la RAI. « Le pape prépare les esprits à la décision qui sera prise concernant Medjugorje », affirmait déjà en juin 2015 le P. Salvatore Perrella Maria, membre de la commission d’enquête, dans l’Avvenire, le journal de l’épiscopat italien.

Voir le Journal La Croix du mardi 14 février 2017

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