Une école fondée sans l’aide de la France
Bien que cette Ecole ne soit redevable de rien à la France puisqu’elle a été fondée sans aucune demande ni intervention des autorités françaises, les Français de marque, responsables ou non des affaires publiques, ne manquaient pas l’occasion de rendre visite à une œuvre qui, par sa réputation, rehaussait l’image que les Yougoslaves se faisaient de la France. Cette réputation elle l’avait acquise , non pas par les soutiens du Gouvernement, ni par ses Subventions qui étaient plus symboliques que substantielles, mais par le dévouement, le zèle et le sérieux de son personnel.
Des remarques acerbes entendues
au sein du corps professoral
C’était d’ailleurs le cas de toutes les écoles religieuses fondées et dirigées par les Frères et les Sœurs qui avaient dû quitter leur pays en 1903. Leur seul droit était de réussir ; comme la chose se produisait presque toujours, les diplomates et hommes politiques de passage étaient bien obligés d’ouvrir leur sac de compliments pour ne pas perdre la face aux yeux des nations étrangères qui avaient accueilli ces bons serviteurs de Dieu et de la patrie auxquels nos gouvernements sectaires avaient refusé le droit d’enseigner.
Ces remarques acerbes étaient courantes dans le corps professoral et se répètaient à chaque visite officielle : nous en recevions souvent à Béograd.
Un wagon pour transporter les cadeaux reçus
En 1931 – C’était l’Amiral GUEPERATTE qui avait commandé l’escadre française en 1916 aux Dardanelles. Il était très populaire en Yougoslavie. Les Serbes lui vouaient plus que de la reconnaissance, c’était de l’affection ; ils l’appelaient « le papa » ; c’est lui qui en 1915 reçut à Bizerte les invalides et les malades de la malheureuse armée Serbe qui, après sa défaite, avait battu en retraite dans des conditions effroyables à travers un pays dépourvu de ressources et par un froid des plus rigoureux , elle avait ainsi traversé toute l’Albanie et avait échoué dans un état pitoyable sur les côtes de l’Adriatique.
L’Amiral les traita si bien qu’en peu de temps il en refit une armée capable de reprendre sa place sur le front de Salonique. Il reçut tant de cadeaux pendant sa tournée triomphale en Serbie qu’il fallut un wagon pour les emporter.
En 1933 – C’était Monsieur BARTHOU, Ministre des Affaires Etrangères qui , l’année suivante, fut assassiné aux côtés du Roi ALEXANDRE à Marseille.
En 1934 – Le Recteur de l’Université de Paris , Monsieur CHARLETY, ne dédaigna pas de nous faire une visite. Comme il était Savoyard , nous lui fîmes entendre, chanté par tous les élèves réunis, le chant des Allobroges . Il ne s’attendait pas à cette surprise !
En 1935 – Nous avions la joie de recevoir le Maréchal FRNCHEY D’ESPEREY , Chef Honoraire de l’Etat Major Yougoslave.
En 1936 - Le Général GAMELIN, Chef d’Etat Major de l’armée française.
Fr. Hilaire Détraz, extraits de ses Mémoires (1980)