Je n’hésite pas à penser qu’une attente analogue se manifeste à travers le nouveau façonnement de l’Église qui s’accomplit aujourd’hui silencieusement dans la plupart de nos diocèses et de nos paroisses. Des hommes, des femmes apprennent à porter, avec des prêtres, le souci de la présence et de la mission chrétiennes dans notre société.
En devenant « relais paroissiaux », membres des Conseils pastoraux ou des d’Équipes d’animation pastorale, ils découvrent comme de l’intérieur le mystère de l’Église : ils savent désormais, par expérience, que l’Église vit du partage réel de la foi et de la charité chrétiennes, qui sont en elle des dons de Dieu.
On ne peut plus se résigner à rester chacun dans son coin
De ce nouveau façonnement de l’Église émerge un appel adressé à nos communautés. On ne peut plus se résigner à rester chacun dans son coin, ou à l’ombre de son clocher. Il faut apprendre plus résolument et de bon cœur à « faire Corps », à devenir le Corps du Christ, non pas en abolissant les différences, mais en vivant de cette communion qui a sa source dans l’Eucharistie.
On raconte volontiers qu’entre les deux guerres, dans les années 1930, le grand théologien allemand Romano Guardini avait formulé ce diagnostic : « II se passe un phénomène extraordinaire : l’Église s’éveille dans les âmes. »
Je crois que ce phénomène se poursuit de façon silencieuse et souvent profonde grâce à des hommes et à des femmes qui paient de leur personne pour que l’Église vive vraiment de Dieu. Et quand ils participent à cette mission, alors, ils comprennent que l’Église n’est pas en état de survie, même si elle est fatiguée ou usée. Elle est, à l’intérieur même de
ce qui l’use, mise sans cesse par Dieu en état de renouvellement profond, et comme de résurrection. Et je connais bien des communautés chrétiennes qui peuvent témoigner de cette grâce. (…)
Il peut arriver que certaines personnes ne soient
qu’apparemment membres de l’Eglise
Il peut arriver que certaines personnes ne soient qu’apparemment membres de l’Église. En réalité, elles se sont fermées à l’Amour de Dieu. Tandis que d’autres, qui n’appartiennent pas à l’Église, vivent réellement de l’Amour de Dieu, alors qu’elles ne le savent pas.
Nous connaissons tous ces petits et ces pauvres - que nous sommes nous-mêmes à certaines heures -, ces humiliés ou ces oubliés de la société, qui pressentent que la méchanceté des hommes ne peut pas avoir le dernier mot et qu’il doit exister, au-delà de ce monde et en ce monde, une source pure d’Amour totalement gratuit et désintéressé.
Et nous savons aussi à quel point la rencontre de ces pauvres peut être pour nous comme une révélation, ou du moins un appel à découvrir ou à reconnaître à nouveau que l’attente de Dieu fait partie des profondeurs de l’être humain.
Voici des hommes et des femmes blessés ou brisés par les violences de la vie, les injustices de la société, la surdité des autres, et qui frappent à notre porte. Ils nous obligent à aller avec eux vers cette source vive qui est dans le Christ et qui doit se manifester dans son Corps visible.
Mgr Claude Dagens : « Méditations sur l’Eglise catholique en France » p. 88